Entretien avec Tabea Lurk et Juergen Enge

Bruxelles, 5 avril 2011

 

Tabea Lurk et Juergen Enge enseignent à la Hochschule der Künste (Université des arts) de Berne, en Suisse, et à la Staatliche Hochschule für Gestaltung (École nationale supérieure des arts et du design) de Karlsruhe, en Allemagne. Ils travaillent ensemble à la préservation des arts numériques depuis 2006 dans le cadre de projets tels qu’AktiveArchive. Ensemble, ils élaborent stratégies et concepts pour documenter et préserver les œuvres d’art basées sur l’informatique, qui sont confrontées à l’obsolescence de leurs composants matériels et logiciels, grâce à, entre autres outils, leur Netart Router et à l’utilisation de machines virtuelles. Emanuel Lorrain (PACKED vzw) les a rencontrés pour parler de leurs pratiques et comment ils envisagent l’avenir de la préservation des œuvres d’art à composantes informatiques.

 

PACKED : Comment avez-vous commencé à travailler dans le domaine de la préservation d’œuvres à composantes informatiques?

Tabea Lurk : J’ai commencé en 2006 dans le cadre du projet AktiveArchive1, lorsque j’ai été engagée afin de développer des stratégies pour préserver des œuvres basées sur l’informatique, et en particulier celles qui s’appuient sur Internet. C’était après mon volontariat au ZKM de Karlsruhe2. J’avais déjà travaillé là-bas à plusieurs reprises comme étudiante, à partir de 1999. Même si je n’étais pas affectée à la préservation des œuvres, j’étais en contact avec l'arts numérique et les installations interactives.
En tant qu’historienne de l’art, j’ai pu approcher les questions techniques, mais au-delà d’un certain point, il faut certaines connaissances technologiques pour en avoir une pleine compréhension, nécessaire afin de préserver ces œuvres et leur environnement technologique. C’est pour cette raison que Juergen, qui est informaticien, s’est joint à moi.

Juergen Enge : J’ai étudié l’informatique à l’université de Karlsruhe, et j’ai été confronté pour la première fois à l’art numérique en 1997, quand le ZKM a ouvert. Je travaillais alors au ZKM Media Lab et j’étais en contact avec plusieurs artistes, je les aidais à monter leurs œuvres. Dans les années qui ont suivies, j’ai travaillé au Medienmuseum3, où je « réparais » des œuvres. Après le ZKM, je suis allé à l’Université des arts de Zurich où j’ai donné un cours sur la conception d’applications mobiles. Je suis ensuite retourné au ZKM où j’ai été responsable, pendant deux ans, de l’Institut für Netzenwicklung4, une branche du ZKM qui s’occupait spécifiquement des questions liées à Internet, aux sites web, etc.

Après ces deux années, je suis arrivé à l’École nationale supérieure des arts et du design (HfG, Karlsruhe), où j’ai participé à des projets qui tentaient de rassembler les institutions d’arts médiatiques européennes et leurs collections, surtout de l'art vidéo : le premier projet pour lequel j’ai postulé avec Woody Vasulka, était OASIS – Open Archiving System with Internet Sharing (mené par la HfG Karlsruhe) – puis GAMA – Gateway to Archives of Media Art5. C’est alors que j’ai commencé à travailler avec Tabea au développement de routines pour la conservation, l’organisation de la documentation, etc. – à l’époque, elle était encore liée à AktiveArchive.

 

PACKED : Il était donc important pour vous de réunir vos compétences respectives?

Tabea Lurk : Oui. Même si, en tant qu’historienne de l’art, j’essaie toujours d’analyser l’œuvre, les lignes de code et la programmation, j’ai toujours l’impression de rester en surface. Il est plus intéressant de travailler avec un spécialiste de l’informatique comme Juergen, qui a de l’expérience dans les arts médiatiques et peut identifier quels composants forment le noyau technique de l’œuvre.

Juergen Enge : Je m’occupe de l’aspect technique de l’identification des composants, tandis que Tabea traite de l’aspect sémantique.

 

PACKED : Quelle est votre première approche d’une œuvre d’art?

Tabea Lurk : En temps normal, on fait d’abord une copie de sécurité. L’un des grands avantages du numérique, c’est qu’on peut faire autant de copies qu’on le souhaite. On peut ainsi tester différents aspects sans risquer d’abîmer l’œuvre. Quand j’examine une pièce, j’essaie de documenter le code et d’avoir une idée générale de ce sur quoi le cœur est basé. Je cherche à comprendre comment elle fonctionne en profondeur. puis ce qui est nécessaire pour préserver ce cœur. Donc d’abord j’analyse l’œuvre, puis Juergen intervient pour en examiner les aspects technologiques.

Parfois, une œuvre peut être préservée de plusieurs manières, mais ce qui nous intéresse, c’est de déterminer comment conserver son authenticité. Que veut-elle dire ? Quel est « l’original » ? etc. Une compréhension technologique est très importante dans une telle démarche. Le travail de préservation s’en trouve facilité et mieux réalisé, parce qu’une fois que ce cadre technologique est clairement établi, la discussion peut commencer. Comment établir la documentation de l’œuvre ? Quelles stratégies choisir ? Nos deux points de vue complémentaires sur l’œuvre sont nécessaires, parce que lorsqu’on travaille seul, l’autre n’est pas là pour nous corriger. Le dialogue est important pour être sûr de rester sur la bonne voie.

 

PACKED : Dans vos écrits, vous distinguez deux grands ensembles dans une œuvre d’art : les « composants pertinents de l’œuvre » et les « éléments environnementaux ». Vous avez ainsi développé le concept de « logique de l’œuvre » pour dégager les thèmes qu’elle aborde. Pouvez-vous nous expliquer plus en détail cette distinction et ces concepts?

Tabea Lurk : Nous essayons de déterminer quel est le « cœur » de l’œuvre, puis d’en identifier progressivement les « couches », comme celles d’un oignon, afin de déterminer quels sont les composants indispensables, quel type de bibliothèque logicielle est nécessaire, etc. Puis on passe à la couche suivante, et on arrive au système d’exploitation, qui est souvent moins important. Ces distinctions sont cruciales car elles permettent de changer ou de modifier des éléments afin de préserver l’œuvre à long terme.

Juergen Enge : Pour nous, il existe deux points de vue possibles sur la « logique » d’une œuvre d’art. Ils correspondent à deux niveaux sémantiques : l’approche technologique, d’une part, et l’approche historique et culturelle, d’autre part, qu’on pourrait également appeler le « niveau du sens ».
Dans l’approche technologique, on définit par exemple les éléments logiciels qui n’appartiennent pas au système d’exploitation et qui font partie de l’œuvre. On peut ensuite analyser la manière dont ces éléments interfèrent avec le reste de l’œuvre. Dans l’approche sémantique, on qualifie les éléments de l’œuvre basés sur des objets : on prend l’ordinateur comme un objet, fait de hardware et de software, etc. et on regarde quelles parties ont été modifiées par l’artiste. Cette approche renvoie davantage au point de vue de l’histoire de l’art.

 

PACKED : Pouvez-vous donner un exemple de ce que vous appelez le « cœur » d’une œuvre?

Tabea Lurk : Deux études de cas sur lesquelles nous avons travaillé récemment peuvent illustrer ces deux niveaux ou approches de la « logique de l’œuvre » : Liquid Perceptron (2000) et Schnur (2004/2010).
Liquid Perceptron est une installation interactive de Hans H. Diebner6, où le visiteur entre dans une pièce à l’intérieur de laquelle il assiste à une sorte de projection vidéo grandeur nature, en circuit fermé. Le visiteur voit sa propre image dans la vidéo. Il ne s'agit pas d'une représentation très claire, mais des mouvements sont traduits en ondulations. L’espace filmé est reproduit à l’écran, d’après la théorie et les algorithmes des réseaux neuronaux. Dans son ensemble, l’installation représente une espèce d’interférence d'un réseau neuronal.

 

Vue de l'installation Liquid Perceptron à Berlin durant l'évènement Einstein on the Beach, 2005. Avec la permission d'Hans Liebner.

 

L’élément important dans cette œuvre, c’est que le code est basé sur une formule de physique, de sorte que l’œuvre intègre une connaissance scientifique très précise. Dans ce cas-ci, il est impératif que le code demeure inchangé, tel que dans la formule scientifique. La question de l’apparence de l’œuvre n’est pas l’enjeu principal – bien que l’installation suive un certain style, correspondant aux idées esthétiques de l’époque et au « goût » de l’artiste.

Pour l’artiste, l’accent sur le concept de réseau neuronal est plus important que l’aspect visuel et le fonctionnement futur de l’œuvre. D’une certaine manière, cette installation révèle une théorie comprise en elle, de telle façon que l’on a une compréhension très claire du « cœur ». Là, se trouve un code très simple, programmé par l’artiste. Cependant, ce cœur utilise des bibliothèques logicielles liées à l’œuvre, mais qui ne font plus partie du cœur en tant que tel. L’artiste ne les a pas programmées ; ce sont des bibliothèques Linux, qui permettent au système de capturer l’image vidéo.

 

PACKED : Dans ce cas, le musée a acquis le code source en même temps que l’œuvre, ce qui n’est pas une situation très courante.

Tabea Lurk : En effet. Dans l’autre étude de cas, consacrée à Schnur de Jan Voellmy7, la situation était différente, parce que c’est un fichier Flash dont nous ne possédions que le fichier exécutable. En temps normal, on a besoin des fichiers sources pour faire les ajustements nécessaires lorsqu’on place une œuvre d’art dans un contexte nouveau.
Dans cette œuvre, on voit un morceau de ruban adhésif bleu (ou orange) collé sur un mur, sur lequel est projetée l’image d’une corde – comme si une corde blanche était scotchée au mur par le ruban adhésif.,D'un poit de vue technologique, le concept de base est que chaque fois que quelqu’un parle ou fait un commentaire, la corde bouge en fonction du son. L’œuvre est très simple, et son concept très clair, mais elle est bien plus difficile à préserver que Liquid Perceptron.

Dans ce contexte, même le système d’exploitation devient « essentiel à l’œuvre », parce qu’on a vraiment besoin de Flash Player pour la montrer. Ensuite viennent les questions sémantiques : que signifie Flash dans ce contexte ? L’artiste tenait-il à utiliser ce logiciel ? Très souvent, le recours à tel ou tel programme dépend du contexte, ou de ce qui était disponible au moment où l’artiste en avait besoin.

 

Plan de l'installation Schnur. Avec la permission de Jan Voellmy.

 

PACKED : L’approche de l’« oignon » vous permet-elle de déterminer quelles œuvres seront plus compliquées à préserver?

Juergen Enge : L’analyse du cœur de l’œuvre ne nous dit rien sur sa complexité, mais nous donne un indice sur ce qui demandera plus d’efforts durant le processus de préservation. Une fois le cœur identifié, on essaie de ne pas le modifier. Prenons l’exemple d’un composant connecté au cœur tel qu'un module d'acquisition vidéo : on peut établir que le cœur en a besoin, d’un point de vue technique. Mais l’important, c’est d’avoir la bonne interface pour insérer, par exemple, une image vidéo dans l’œuvre – comme dans Liquid Perceptron. Par conséquent, on peut apporter plus de modifications à cette partie logicielle, tant qu’on s’assure que l’interface ne transforme pas le cœur – ou tant qu’on a une idée claire des éléments pour lesquels l’artiste a inscrit ses concepts dans une formule. En identifiant le cœur, on a une meilleure idée des aspects pour lesquels nous devons concentrer nos efforts.

Tabea Lurk : Oui, je pense qu’une telle « logique de l’œuvre », avec ses classifications, donne une idée de la complexité de l’œuvre, en matière de difficulté de préservation et de relation entre les différents composants.

 

PACKED : La phase de documentation correspond-elle également au moment où la « logique de l’œuvre » est définie?

Tabea Lurk : Oui, la documentation est un véritable outil de travail. L’objectif n’est pas simplement de constituer pour l’œuvre une documentation qui sera disponible et qui pourra être transmise ou communiquée plus tard. La documentation nous aide aussi à analyser l’œuvre plus profondément et à en identifier les différents composants. Le processus de documentation nous donne une idée de ce que seront les prochaines étapes et les possibilités pour l’œuvre.

 

PACKED : Dans vos écrits, vous évoquez souvent l’« encapsulation » d’une œuvre. Que signifie ce terme, à l’égard de la préservation des œuvres d’art numérique?

Tabea Lurk : Pour garantir que le cœur de l’œuvre demeure inchangé, il faut créer une sorte d’« environnement support », une « capsule » dans laquelle il sera conservé. Cette unité fonctionnelle constitue ce que nous appelons l’« encapsulation ». L’œuvre d’art consiste en ce qui se trouve à l’intérieur de cette capsule : le noyau et l’environnement. Les surfaces extérieures de cet environnement encapsulé peuvent ensuite être transformées. L’encapsulation est en quelque sorte une amélioration de l’idée d’émulation. Dans son approche des différentes stratégies de préservation, Lee Kyong-Ho8 utilise le même genre de termes pour donner l’impression qu’on crée une capsule ou une bulle, qui est ensuite préservée, afin de ne pas altérer la nature de l’œuvre. L’encapsulation renvoie au débat philosophique entre la migration et l’émulation, question à laquelle nous ne voulons pas simplement répondre en disant qu’il n’existe qu’une seule solution valable.

Juergen Enge : D’un point de vue technique, l’encapsulation peut utiliser des technologies très différentes. Une possibilité est l’émulation, une autre est la virtualisation. Mais il existe d’autres options, comme des bibliothèques émulant d’autres bibliothèques. On peut par exemple utiliser des programmes Unix sur un système Windows si on a les bonnes bibliothèques d’émulation, mais ça ne concerne pas le hardware, seulement l’environnement logiciel, ce qui est tout à fait différent de l’émulation d’environnements matériels. L’encapsulation peut aussi désigner à peu près tout moyen permettant d’insérer une couche logicielle entre l’œuvre d’art et, par exemple, l’environnement d’exécution9, le système d’exploitation ou le hardware.

Tabea Lurk : Avec la méthode de l’encapsulation, la capsule n’est pas toujours complète. Par exemple, dans le cas de la virtualisation, il y a des interférences entre la machine virtuelle et la machine réelle (hardware), créant encore une certaine dépendance à cette dernière. Si on utilise une « couche logicielle » qui peut en quelque sorte agir comme traducteur entre l’œuvre et l’extérieur de la capsule, ça devient plus clair. L’idée de base derrière l’encapsulation, c’est de se débarrasser de la dépendance au hardware afin d’éviter les problèmes que causera l’obsolescence de certains équipements. Il est évident, néanmoins, qu’on ne fera pas disparaître tous ces problèmes.

Juergen Enge : En informatique, il existe ce qu’on appelle des « patrons de conception »10 pour l’architecture des logiciels. Un proxy11 ou un bridge12 équivalent à certains de ces patrons, procurant la couche logicielle nécessaire à l’encapsulation. En regardant de plus près les patrons de conception utilisés en informatique, on pourrait employer de nombreuses stratégies de préservation prédéfinies.

 

Schéma analytique de l'architecture système originale de Liquid Perceptron d'Hans Diebner. Avec la permission de Juergen Enge.

 

PACKED : Peut-on dire que l’« encapsulation » n'englobe qu’une partie de l’oignon, et que la couche logicielle est placée entre deux « couches » de cet oignon?

Tabea Lurk : Tout à fait. Ensuite, cela dépend du fonctionnement de l’interface. Si on a, par exemple, un signal entrant provenant d’une caméra vidéo ou d’une source audio. Très souvent, les pièces qui utilisent la vidéo ont des cartes graphiques spéciales qui créent ce genre de dépendances. C’est pourquoi nous essayons d’établir une définition claire de l’intérieur et de l’extérieur de la capsule.

Juergen Enge : Nous tenterons donc, à l’avenir, de connecter toutes les interfaces matérielles (hardware) à un réseau. Sur un ordinateur, il existe plusieurs interfaces générales, dont nous tenterons de déterminer lesquelles sont stables ou non. Un bon exemple de ceci pourrait être l’interface pour une pile TCP/IP13, qui est bien plus stable que celle de certains appareils en USB. Une webcam à 10 euros n’est pas aussi stable qu’une caméra connectée à un réseau ; cette dernière pourra être émulée beaucoup plus facilement qu’une caméra USB.

On peut dire également, en matière de spécifications graphiques, qu’Open GL est bien plus stable que Direct X, parce qu’Open GL est open source et peut être émulée par un logiciel sur les nouveaux systèmes d’exploitation de manière plus efficace que les diverses versions de Direct X sur un nouveau système Windows.

D’après nous, ce n’est pas une très bonne idée de migrer d’un système de hardware propriétaire à un autre, parce que le résultat sera le même. Dans le meilleur des cas, il faudra effectuer le même travail d’émulation et de restauration après quelques années. Dans le pire des cas, on pourra même perdre quelque chose en cours de route. C’est pour cette raison que nous essayons d’éviter de faire deux fois le même travail ou des travaux équivalents.

 

Shéma analytique de l'architecture système préservée de Liquid Perceptron d'Hans Diebner. Avec la permission de Jürgen Enge.

 

PACKED : Cela s’apparente-t-il à la définition de standards?

Tabea Lurk : Non, c’est le rôle du domaine des archives de définir ce qu’est un bon ou un mauvais format. Nous essayons simplement d’appliquer leurs critères aux questions qui se posent avec les œuvres basées sur l’informatique. Nous tentons d’utiliser leurs habitudes en matière de gestion des risques, leurs routines de monitoring, et leurs définitions des standards de qualité. De manière générale, ces dernières années, sont apparus beaucoup de concepts et de développements testés et éprouvés, et auxquels on peut s’adapter. Ce sont des choses très importantes pour nous.

En ce qui concerne les standards actuels, ils se rapportent à des formats de fichiers statiques, à des protocoles de bases de données comme le SIARD14, mais pas à des objets numériques complexes ; ils servent principalement à la recherche. Malheureusement, dans le domaine des arts basés sur l’informatique, il y a toujours un moment où un besoin précis reste sans réponse, et il faut alors aller un peu plus loin. Nous pouvons nous le permettre, parce que nous sommes basés dans une école d’art ; nous ne sommes pas un musée avec sa propre collection qui doit définir des stratégies de préservation et prévoir des résultats. Le fait d’être intégrés à l’université nous autorise à mener certaines recherches de base. Grâce à nos études de cas, nous pouvons parcourir la littérature scientifique continuellement produite qui circule dans le monde entier, mais aussi analyser certaines questions plus en détail. Et nous pouvons commencer au niveau que nous estimons et définissons comme pertinent – très souvent, dans le prolongement de problèmes apparus de manière inattendue au cours de recherches précédentes.

 

PACKED : Comment avez-vous commencé à réaliser des études de cas ? De quelles collections provenaient les œuvres étudiées?

Tabea Lurk : Sur la base de notre expérience avec les œuvres du ZKM, nous avons commencé à travailler avec nos propres CD-ROM pour déterminer comment nous pourrions sauver ces œuvres, et comment elles fonctionneraient avec un émulateur. Ensuite, nous avons élargi nos recherches à des œuvres sur Internet.
Nos deux dernières études de cas concernaient des œuvres issues de collections privées. À Berne, nous sommes capable d'agir comme une sorte de tiers qui se charge de faire des études de cas à la demande des propriétaires.

AktiveArchive a été fondé par le ministère de la Culture dans le but de devenir un centre de compétences. Notre mission était de développer ce genre de connaissances, afin de pouvoir aider les musées par la suite. Johannes Gfeller15 est chargé de la conservation des œuvres vidéo et de la préservation des équipements anciens.
La partie numérique est maintenant située à l’Université des arts de Berne, au ArtLab, au sein du département de conversation, où je travaille, ainsi qu’à l’École des arts et du design de Karlsruhe, où Juergen est à la tête du centre de recherche sur l’archivage numérique. Les gens viennent nous voir pour nous poser leurs questions sur la préservation numérique et nous les conseillons. Pour les cas plus complexes, nous tentons d’obtenir des bourses de recherche. Nous sommes actuellement en négociations avec la Tate Modern et la Kunsthaus de Zurich pour travailler sur deux études de cas.

 

Vue de l'exposition Regionale9 à [plug.in], Basel, 29.11.2008 - 04.01.2009. Avec la permission de Jan Voellmy.

 

PACKED : Comment vos années au ZKM ont-elles influencé votre approche ? Vous ont-elles préparés aux problèmes que vous rencontrez aujourd’hui?

Juergen Enge : Dans les années 1990, je participais aux discussions avec les artistes qui créaient des CD-ROM, des programmes ou des installations, j’avais donc la chance de voir comment ces œuvres étaient conçues. Grâce à cette place privilégiée, j’avais un excellent aperçu des technologies appliquées, car à cette époque j’étais là comme programmeur, et tous ces artistes avaient besoin d’aide pour la programmation.
Cette expérience m’aide encore dans la mesure où j’ai une vision de ce qui se faisait dans les années 1990 de manière générale. Je peux estimer quel type d’erreurs on faisait à l’époque, parce qu’on avait souvent affaire par exemple à des ordinateurs très lents, qu’on essayait d’améliorer avec des hacks bizarres. Cette expérience me sert encore quand je regarde une œuvre aujourd’hui. C’est comme un ensemble de stratégies et de solutions, non écrites mais fréquentes, pour des problèmes largement connus. Et on peut ainsi imaginer quelles options ont été finalement préférées pour la résolution de ces problèmes, etc.

Quand on analyse une œuvre d’art, les théories qui étaient en vigueur à l’époque permettent d’estimer quelles solutions ou quels types de logiciels étaient privilégiés. C’est très utile, par la suite, pour identifier des problèmes et l’importance de certains éléments logiciels. D’un autre côté, on peut encore comprendre les différents points de vue qu’un artiste peut avoir eus en se basant sur la stratégie d’implémentation. Souvent, les artistes ont simplement appris à programmer eux-mêmes, et il n’y a donc pas forcément de théorie ni de philosophie derrière les logiciels choisis – même si c’est parfois le cas – comme l’utilisation d’applications open source, l’usage constant des dernières technologies ou, au contraire, seulement des matériaux dépassés, etc.

 

PACKED : Dans l’un de vos textes, vous dites : « Les ordinateurs sont considérés comme des œuvres d’art lorsqu’un logiciel est installé dessus. » Cela veut-il dire aussi que même sans le hardware, le logiciel serait une œuvre d’art?

Tabea Lurk : Pas nécessairement. On ne peut pas l’affirmer de manière générale. Dans certains cas, c’est ce que l’artiste a modifié qui devient l’œuvre d’art. Par exemple les pièces de Cory Archangel, où il utilise et manipule des cartouches physiques. Elles sont vraiment difficiles à préserver. On ne peut pas simplement encapsuler la partie logiciel, et d’ailleurs je me demande s’il existe une seule œuvre de Cory Archangel qu’on puisse encapsuler sans devoir utiliser toujours le même hardware pour la montrer, ou sans réduire l’œuvre à ce qu’on appelle la « documentation ». Si ça fonctionnait techniquement, ce serait formidable, mais sans le hardware, on appellerait plus cela une œuvre d’art.

Dans ce cas-là, le hardware est extrêmement important. Mais je suis d’accord que cela dépend du type d’œuvre qu’on regarde. Jusqu’à présent, nous nous concentrons sur les œuvres dans lesquelles l’ordinateur est interchangeable car ce n’est qu’une machine qui tourne en arrière-plan. Une machine qui produit des effets et qui maintient un concept logique moulé dans un logiciel.

 

Super Mario Clouds, 2002-. Cartouche hacké du jeu Super Mario Brothers pour console Nintendo NES. © Cory Arcangel. Avec la permission de Cory Arcangel.

 

Les gens pensent parfois que le moyen le plus facile de préserver une œuvre d’art basée sur l’informatique, c’est de conserver le hardware. On achèterait par exemple un second Mac Mini pour une œuvre et on créerait une image du disque pour avoir une copie de sécurité. Selon moi, c’est la méthode intermédiaire, préliminaire, pour conserver une œuvre d’art – une routine de back-up, pour ainsi dire. Mais notre objectif, c’est d’aller plus loin que ça, d’avoir une idée de ce qui se passerait si le hardware n’était plus accessible. Ça veut dire qu’il faut analyser, comprendre et documenter l’œuvre d’art. Évidemment, il faut avant tout déterminer si les composants techniques ont une importance sculpturale ou non.

La même question s’applique aux œuvres d’art basées sur une installation, où l’on différencie les composants qui peuvent être remplacés ou non, afin de conserver l’apparence, l’esthétique et le fonctionnement d’origine. On accepte très souvent une forme de dégradation de certains éléments, mais d’autres doivent être conservés tels quels. Ça dépend fortement de l’artiste.

 

PACKED : Les modifications sont-elles acceptables tant qu’elles concernent l’extérieur de la capsule?

Tabea Lurk : J’aimerais répondre à cette question par deux affirmations et deux exemples donnés par le célèbre conservateur d’art contemporain, Erich Ganzert-Castrillo. Un jour, lors d’une conférence, il a comparé une phrase de Reiner Ruthenbeck à une autre de Katharina Fritsch. Pour Ruthenbeck, la surface parfaite de ses sculptures renvoie au concept de l’œuvre, signifiant que le moindre dégât ou accroc dans cette surface nécessitera que celle-ci soit repeinte. La surface doit toujours avoir l’air parfaite. Katharina Fritsch, elle, raisonne différemment : après avoir réfléchi à Tischgesellschaft (1991) au Museum für Gegenwartskunst de Francfort – je ne peux que rendre l’essentiel de sa phrase – elle a mentionné que même si elle préfère le moment où tout est beau et neuf, elle doit accepter que l’œuvre vieillisse. Elle refuse les arrangements cosmétiques constants, qui lui rappelleraient l'apparence d’une femme qui a subi d’innombrables liftings16.

 

PACKED : C’est la question de la patine dans le contexte des œuvres d’art basées sur l’informatique?

Tabea Lurk : Oui, et c’est une question très difficile. Même si nous essayons de trouver des modèles de décision et de traitement et d'appuyer sur l’« éthique de la conservation », afin de déterminer ce qui sera le plus adapté aux questions que pose le numérique, il y a de nettes différences. C’est toujours difficile de trouver un équilibre.

Juergen Enge : Par exemple, dans certaines œuvres de Stephan von Huene, le boîtier de l’ordinateur, en tant qu’objet, doit être présent, il fait partie de l’installation. C’est un enjeu important pour sa conservation, parce que ses œuvres montrent vraiment le glissement, la connexion entre l’analogique et le numérique. Il utilisait d’énormes cartes mères sur lesquelles il soudait les broches, parce qu’il comprenait très bien, sur le plan mécanique, les procédures et les séquences d’action. Dans Table Dancers (1988-1995), par exemple, il a lui-même conçu les automates et leur chorégraphie, dans les moindres détails. Il a créé des circuits électroniques grâce à ses vastes connaissances en robotique. Pour le dire autrement : c’était un artiste du monde analogique qui par la suite à basculé vers le numérique.

Tabea Lurk : Juergen a numérisé des parties de scripts ainsi que la documentation très détaillée tenue par Stephan Von Huene de son vivant. Ils contiennent énormément d’informations sur les œuvres, et feront partie du projet DCA17.
Dans certains cas, le boîtier de l’ordinateur a une valeur sculpturale, comme dans Raw Material – BRRR18 de Bruce Nauman, où le carton d’emballage d’origine du vidéoprojecteur est censé être présent dans l’installation, servant de support sur lequel est posé le vidéoprojecteur.
Avec de telles positions conceptuelles, concernant un ordinateur ou n’importe quel composant technique, la question centrale est : est-ce qu’on peut le remplacer par un autre?

 

 Schmitt, Bernhard © VG Bild-Kunst 2004

 

PACKED : Mais si ce n’est qu'une question de boîtier, la solution ne serait-elle pas de le garder pour sa valeur sculpturale, même si l'appareil n'est plus fonctionnel?

Tabea Lurk : Oui, c’est une question qui se pose souvent parce que les ordinateurs deviennent de plus en plus petits, et dans une œuvre encapsulée, on pourrait cacher un petit système fonctionnel dans le boîtier plus grand de l’ancienne machine. Cependant, si la même œuvre se retrouve dans trois ou quatre collections, comme dans le passé, on risque de voir que chaque collection a choisi une stratégie de conservation différente parce que celle-ci dépend aussi fortement de la politique de la collection.

La question de la meilleure manière de préserver une œuvre numérique est controversée, et heureusement, en tant qu’historien de l’art, on n’a pas à trancher. Il est très difficile, selon moi, de savoir ce qui est bon ou mauvais, parce que si vous dites que vous avez choisi la migration, plusieurs personnes vous diront que c’est pire que l’encapsulation, et inversement. Nous souhaitons que le débat soit permanent, afin de développer un vocabulaire et des outils plus élaborés. Pour être en mesure d’énoncer des principes généraux, il est important que notre travail reste très proche de l’œuvre. Nous cherchons des routines pour les musées, qui clarifient les procédures à mettre en place dès qu’une œuvre arrive dans une collection. Que le PC de l’artiste, par exemple, n’arrive pas dans l’exposition, où il tournera pendant cinq ou six semaines, avant qu’on se demande si un back-up a été fait.

 

PACKED : Est-ce que vous développez ce type de routines?

Tabea Lurk : En quelque sorte. Une des choses difficiles à expliquer dans notre approche, c’est que nous estimons que, d’un côté, les gens ne devraient pas avoir peur de toucher les œuvres d’art numériques… Mais d’un autre côté, face à une œuvre qui utilise du plexiglas, on ira demander à un spécialiste comment travailler avec ce matériau. Ça devrait être la même chose avec les arts numériques. Même si tout le monde utilise des ordinateurs tous les jours, ça ne veut pas dire qu’on comprend réellement leur fonctionnement. Il est utile, à un certain moment, de consulter un informaticien, afin qu'il regarde l'œuvre de plus près. Mais d’après moi, effectuer les routines de base et les procédures de sauvegarde doit être possible.

 

PACKED : Les musées rencontrent ce problème parce que la préservation d’œuvres numériques requiert beaucoup de connaissances différentes. À qui les musées doivent-ils s’adresser pour obtenir de l'aide?

Juergen Enge : À mon avis, ces problèmes doivent être résolus au cas par cas : dans un premier temps, il faut analyser l’œuvre d’art, ce qui veut dire qu’il faut pouvoir l’observer suffisamment, et identifier et rassembler les appareils connexes, etc. Cela, tout le monde peut le faire, en s’aidant de tableaux et de bases de données. Mais très souvent, ces appareils connexes ne sont pas liés au cœur de l’œuvre d’un point de vue technique. Pour comprendre la structure interne d’une œuvre d’art et pour identifier les étapes suivantes de la conservation préventive ou de la restauration, un musée doit poser ces questions à des personnes différentes.

D’une part, on a besoin des connaissances d’un historien de l’art, par exemple, qui comprend le concept d’authenticité et qui peut se poser les questions qui y sont liées. D’autre part, il y a aussi des questions techniques pour lesquelles il faut connaître les structures logiques des programmes informatiques. C’est là qu’il faut contacter un informaticien ou un programmateur qui comprenne la théorie informatique. Ce sera peut-être cette même personne qui, plus tard, aura une idée de ce qui sera faisable dans le futur, lorsque la technologie utilisée ne fonctionnera plus.

 

Schéma caractérisant les quatre différentes aires principales (dimensions) de la "logique de l'œuvre". Avec la permission de Tabea Lurk.

 

PACKED : Les musées doivent donc recourir à des aides extérieures, au sein de différentes communautés, au travers d'une sorte de réseau?

Tabea Lurk : Oui, mais il y a aussi certaines routines dont les musées peuvent s’occuper eux-mêmes, surtout les grandes institutions qui possèdent un service informatique. Ils peuvent apprendre rapidement les procédures de sauvegarde et de traitement en cas de panne, afin de pouvoir commencer le travail en interne.
De nombreux aspects sont les mêmes que dans la conservation classique. Une grande différence entre les œuvres numériques et celles basées sur des matériaux est que les premières ne sont plus de simples objets physiques, uniques. Dès lors, les problèmes peuvent se multiplier. Il ne suffit pas de savoir manier un ordinateur ou un programme pour conserver une œuvre. Il faut documenter les bons paramètres afin de pouvoir adapter l’œuvre au lieu d’exposition. Une caméra d’un système de vidéosurveillance devra être correctement calibrée, par exemple.

Au niveau de la préservation, il faut aller plus loin que ça encore. Je ne veux pas dire que la conservation est plus facile – la création d’un réseau est une bonne stratégie, car toutes les parties apprennent les unes des autres – mais la compréhension de la logique d’une œuvre dépasse souvent l’expérience et les connaissances mathématiques des conservateurs d’aujourd’hui.

Juergen Enge : Il faut également distinguer la préservation et la réparation d’une œuvre numérique. Très souvent, on se contente de réparer les œuvres. Si on veut réparer une voiture, on en change simplement des pièces ; même si on conduira encore cette voiture plus tard, on ne dira pas qu’on l’a préservée pour l’avenir.

Tabea Lurk : Récemment, dans une discussion, nous avons réalisé que les artistes qui créent des œuvres utilisant l'informatique sont extrêmement conscients des problèmes qui peuvent survenir. Ils essaient de livrer une œuvre déjà prête à être montrée : le « mode kiosque » est activé, certains éléments sont cachés, etc. Il suffit de trouver sur le bureau le fichier à exécuter, si l’œuvre ne se met pas automatiquement en marche. Nous devons apprendre à accepter ces pratiques pour les expositions, mais nous avons aussi besoin d’une sorte de second niveau pour la préservation, pour lesquels un fichier exécutable n’est pas suffisant. Cela peut prendre plus de temps ; il faut demander le code source, tous les éléments de l’œuvre, et poser toutes les questions contenues dans le questionnaire Matters in Media Art19.
En d’autres termes : la monstration et la préservation à long terme sont deux procédures distinctes, relevant d’approches différentes.

 

PACKED : Il faut donc conclure une sorte d’arrangement avec l’artiste?

Tabea Lurk : En effet, ça peut être intéressant pour les deux parties, parce que les artistes ne peuvent préserver seuls toutes leurs œuvres.

 

PACKED : Comment avez-vous commencé à utiliser la virtualisation?

Tabea Lurk : Cela est venu pour la première fois lorsque nous avons dû montrer, hors ligne, une œuvre en réseau. C’était une pièce liée au serveur 20, important en Suisse qui est apparu en même temps que la Rhizome Art Base. De nombreuses œuvres étaient simplement montrées en ligne depuis ce serveur. Le projet web Shrink to Fit21 était associé à une série d’autres projets web spéciaux.
Tout le monde pouvait se procurer un petit script, qui fonctionnait comme une sorte de portail et d'outil de navigation vers les autres projets, et l’intégrer sur son propre site web. Au départ du projet, une nouvelle pièce était montrée une ou deux fois par mois, si je me souviens bien. C’était une sorte de collection d’œuvres avec l'idée de faire comme une exposition sur les site des institutions culturelles et les pages web de toutes sortes de personnes. C’était une pièce faite pour des écrans même très petits.

Techniquement, ce n’était pas si difficile de la montrer hors ligne, parce que l’interactivité était basée sur un script et qu’aucune interrelation avec Google ou un autre service sur le web n’était nécessaire. La première chose que nous avons faite, c’est de la rendre portable en la mettant sur CD-ROM. Puis nous avons utilisé un serveur Apache sur un simple ordinateur de bureau pour que le client communique comme avec un serveur.
Nous voulions vraiment que l’œuvre communique en passant par un réseau, tel qu’elle était censée le faire à l’origine (et pas simplement en ouvrant des pages HTML sur un navigateur local), même si on aurait pu la montrer sans réseau. Le problème du CD-ROM, c’est qu’il est en lecture seule. Il est gravé une fois pour toutes et si le système a besoin d’un forme de mémoire temporaire, qui passe en principe par le disque et la RAM, ce n’est pas possible avec un CD-ROM. C’est pourquoi nous avons commencé à travailler sur la virtualisation : afin d'avoir des options en ce qui concerne les changements de l’interactivité ou à tout le moins une mémoire temporaire stockée dans la RAM.

L'interface en Flash de Shrink To Fit sur xcult.org.

 

Juergen Enge : Grâce à la virtualisation, nous avons également pu conserver l’URL ou le nom de domaine, qui sont souvent très importants, et qui font partie de l’œuvre.

Tabea Lurk : Nous avons aussi réfléchi aux navigateurs utilisés de 1995 à 1997. Nous voulions avoir une sorte de galerie de navigateurs. Comme les anciens navigateurs tournent sur des anciens systèmes, la virtualisation s’est révélée être – à ce stade – une bonne solution. On peut construire des bibliothèques logicielles pour chaque système d’exploitation afin de le rendre accessible. Ensuite, on crée une image de celui-ci22, avec l’œuvre intégrée dans la machine virtuelle, ce qui pourrait constitué un outil pour qu’elle reste portable.

Par la suite, nous avons pensé utiliser la virtualisation pour les bibliothèques de CD-ROM, dans le but de trouver des points de départ desquels l’œuvre pourrait toujours démarrer.

Juergen Enge : Notre bibliothèque de CD-ROM ne lance pas un CD-ROM ; elle lance un système d’exploitation et un certain état du système. La question n’est plus de savoir comment insérer un CD-ROM dans un système, puisqu’on peut simplement démarrer le système grâce à un instantané23.

 

PACKED : L’utilisateur n’a donc aucun contact avec le logiciel de virtualisation proprement dit?

Juergen Enge : Non. C’est un autre argument en faveur de la virtualisation : la machine virtuelle peut être contrôlée à distance. C’est très important pour nous, parce que l’utilisateur ne doit pas être conscient de ces étapes, ni devoir naviguer dans le menu de virtualisation. Il faut donc contrôler cela à distance, via le réseau, et construire un système dans lequel la machine virtuelle pourra être démarrée par un appareil MIDI, par exemple.

Le port graphique24 et la souris sont utilisés pour afficher le CD-ROM. On ne peut pas se fier aux fonctions clavier parce qu’elles appartiennent à la machine virtuelle. Il est possible, cependant, d’utiliser un appareil MIDI comme un pad qu’il suffirait de presser pour démarrer la machine virtuelle. Il serait même possible de modifier la vitesse de la machine virtuelle avec un « fader » MIDI, pour la faire tourner plus vite ou plus lentement.

Tabea Lurk : Nous souhaitons que les éléments les plus techniques et complexes soient plus ou moins cachés, parce qu'ils sont souvent sans intérêt pour l’utilisateur. De plus, un accès trop complexe à l’œuvre peut réellement lui nuire.

 

PACKED : Quels logiciels de virtualisation et d’émulation utilisez-vous?

Juergen Enge : Nous avons décidé d’utiliser le logiciel VMware Workstation parce qu’il possède une excellente API pour le contrôle à distance, et un pilote du sous-système très stable. Sont notamment inclus les pilotes pour des cartes son sous Windows 98. D’autres systèmes de virtualisation comme VirtualPC, de Microsoft, et Virtual Box, de Sun Microsystems/Oracle, présentent bien plus de problèmes de réseau, de pilotes, etc.

Le choix de l’émulateur dépend des besoins et de la stratégie de conservation. Nous avons eu affaire à des cas issus de la Demoscene25, par exemple, pour lesquels nous avons utilisé DOSBox26 parce qu’on pouvait ralentir ou accélérer le système à distance. C’était une très bonne solution pour ce type d’œuvres. Mais j’utilise également QEMU27, un interprète VHDL28 qui, du point de vue théorique, est un émulateur parfait. Dans la pratique, il y a de temps à autre des problèmes de pilotes avec DOSBox, et QEMU peut être préférable à cet égard.

Tabea Lurk : Quand nous avons commencé à utiliser la virtualisation, nous rencontrions beaucoup de problèmes, par exemple quand nous utilisions des cartes son. C’est pour cette raison que nous combinons souvent la virtualisation et l’émulation, afin de s’assurer que tous les besoins et configurations spécifiques soient couverts.

 

PACKED : Ce n'est donc pas comme si la virtualisation fonctionnait mieux, techniquement, que l’émulation?

Juergen Enge : Non. Parfois il faut vraiment allier les deux, ce qui dépend parfois aussi de la puissance de l’ordinateur utilisé. Si on émule une œuvre qui utilise un carte graphique très chère, ou quelque chose de l’ordre des anciens jeux DOS, il faut un ordinateur très puissant.

Pour la virtualisation, il faut une machine hôte assez rapide. Parfois les nouveaux ordinateurs qui ne font pas plus de 10 cm de large sont trop lents pour la virtualisation. En fait, le logiciel de virtualisation est fortement lié aux standards techniques spécifiques à la machine qu’on utilise. Encore une fois, il s'agit là de problèmes liés au hardware, mais nous espérons avoir bientôt des ordinateurs plus petits ou plus puissants et qui puissent servir à des émulations qui durent plusieurs années.

 

PACKED : À quel point votre travail sur les œuvres d’art basées sur le Web est-il lié à la virtualisation?

Juergen Enge : Pour les œuvres basées sur Internet, on utilise normalement la virtualisation via un serveur, pas le logiciel de virtualisation Workstation susmentionné. Nous avons notre propre infrastructure VMware ESX, facilement applicable à la partie serveur, parce qu’aucune interface matérielle particulière n’est nécessaire. De plus, concernant la partie serveur, nous essayons d’avoir des systèmes plus récents que le cœur de l’œuvre, pour des raisons de sécurité. Si on a accès à tous les composants système nécessaires, on peut construire un réseau virtuel – ce qui est possible avec l’infrastructure VMware, qui comprend aussi des pare-feu spéciaux. En outre, on peut avoir plusieurs exemplaires ou unités de notre Netart RouteurLe 29 , capable d’aller profondément dans le serveur pour une inspection des paquets30.

Tabea Lurk : Les œuvres d’art basées sur Internet représentent une petite partie seulement de notre travail de virtualisation. Pour les œuvres qui utilisent le réseau, nous avions pensé avoir recours à des proxies comme couche logicielle. Nous avons surtout effectué des séances de documentation avec le Netart Routeur, donc nous disposons principalement de d'archives contextuelles.

Pour la conservation du serveur ou des éléments basés sur le réseau, nous utilisons le Netart Routeur. Comme expliqué plus haut avec la logique de l’œuvre, nous ne voulons pas toucher à l’œuvre et très souvent, il y a des éléments qui sont liés à des services en ligne comme Google ou autres. Pour ceux-là, la stratégie de conservation est différente, parce que l’œuvre doit être montrée telle quelle. En général, si Google change son API31, l’artiste adapte son code, mais ce n’est pas ce que nous voulons.

Nous nous sommes dit que si un musée possédait cinq œuvres différentes qui utilisent l’API de Google, elles devraient toutes être modifiées, ce que nous ne souhaitons pas non plus. Nous avons donc placé le Netart Routeur entre l’œuvre et le réseau, et mis en place une routine et une interface, afin de pouvoir ajuster les API en MIDI ou même – d’après les suggestions de l’artiste – remplacer le service de Google, s’il n’existait plus, par celui qui lui aurait succédé.

 

VMware ESX Server permet de vitualiser le stockage et le réseau serveur, permttant à de multiples applications de tourner dans des machines virtuelles sur le même serveur physique. © VMware.

 

PACKED : Comment fonctionne exactement le Netart Routeur?

Tabea Lurk : Le Netart Routeur a trois fonctions principales. La première, c’est l’analyse et la documentation : on peut rappeler et conserve un historique des communications, basé sur les protocoles échangés lorsqu’une œuvre est montrée. La deuxième, c’est d’archiver et de stocker ces historiques, et donc de permettre un accès à ceux-ci, si certains éléments ne fonctionnent plus. L’utilisateur d’une œuvre Internet, par exemple lorsqu’il recherche un terme précis, peut accéder à un ensemble de sessions générées en temps réel, combiné à des éléments stockés issus de cette archives, pour les éléments qui sont dépassées du point de vue technique (anciens services web, webcams, etc.). Ainsi, on peut cartographier les changements dans un environnement réseau. La troisième fonction, c’est celle de proxy.

Juergen Enge : Pour donner un exemple : en ce moment, nous réfléchissons à des moyens de gérer l’IPv632. Comme la plupart des œuvres jusqu’à maintenant utilisaient l’IPv433, nous devrons les faire passer par un proxy d’une manière ou d’une autre. Si une œuvre utilise un ancien système d’exploitation comme Windows 98, on n’arrivera jamais à utiliser l’IPv6. On aura besoin d’une fonction intermédiaire. Nous sommes en train de migrer notre infrastructure VMware et toute notre infrastructure réseau vers l’IPv6. Nous avons donc une infrastructure multiple grâce à laquelle nous pouvons gérer les deux versions de l’IP (6 et 4).

Notre objectif à court terme est de parvenir à une infrastructure IPv6 nette qui permette des ponts vers l’environnement IPv4. Il finira par exister, d’ici environ cinq ans, des institutions qui n’auront plus d’anciennes adresses IP. Mais si elles possèdent des œuvres plus anciennes qui utilisent l’IPv4 ou de navigateurs vintages, etc., il faudra, pour afficher les anciennes pages web, trouver une manière de gérer la différence entre les deux versions, ou établir des passerelles entre l’IPv6 et les anciens navigateurs qui fonctionnent avec l’IPv4 sous Windows 98. Il nous faut donc rechercher des fonctionnalités ou des proxies supplémentaires, pour parvenir à un « système en oignon » comparable à celui que nous avons détaillé concernant la logique de l’œuvre, mais cette fois au niveau du réseau. Même si cette question semble secondaire – en apparence, à la périphérie des enjeux de la préservation – elle est très importante selon nous.

 

PACKED : Dans ce cas, vous pourriez conserver la configuration de l’œuvre en IPv4, qui fait aussi partie de son contexte historique et technologique.

Tabea Lurk : Les artistes se charge souvent longtemps eux-mêmes de la maintenance des œuvres basées sur le réseau – ce qui peut provoquer des changements considérables dans une pièce. La question est la suivante : comment permettre à l’artiste de continuer à transformer ses œuvres, étant donné qu'il s'agit d'un véritable souhait pour lui de les voir fonctionner sur le long terme ? D’un autre côté, il est également important que les musées aient une sorte de collection constituée de « certains états », qui leur permette de revenir à une version antérieure d’une œuvre. Si l’œuvre est interactive et évolue en fonction des interactions avec le public, le musée pourrait vouloir restaurer un état antérieur de celle-ci.

La virtualisation rend cette remise à zéro possible, grâce à la prise de plusieurs instantanés. C’est la même idée que pour le routeur Netart, où l’on conserve des caches, qui sont datés, afin de pouvoir examiner les sessions de 2002 à 2011, par exemple.

La Wayback Machine de l’Internet Archive contient énormément de documents formidables, mais de nombreux trous subsistent, et la mise en pages de nombreux sites n’est pas conservée. Aujourd’hui, les questions et les solutions développées dans nos recherches, pour préserver l’apparence et l’esthétique d’origine des sites web, tendent vers l’émulation des navigateurs.

Juergen Enge : Outre l’affichage du navigateur, il faut déterminer la vitesse du réseau. Dans le passé, les modems avaient des vitesses variables. Même si la vitesse est la partie la plus facile à maîtriser – sous Linux, par exemple, on peut régler la vitesse avec la configuration IP – il faut rechercher la vitesse d’origine.

Tabea Lurk : On peut aussi contrôler la vitesse avec le Netart Routeur.

 

PACKED : La vitesse du réseau est-elle un facteur important pour les œuvres d’art basées sur le réseau?

Tabea Lurk : Dans une œuvre d’Olia Lialina datant de 1996, My Boyfriend Came Back From War, c’était particulièrement vrai. Lors d’une présentation à Karlsruhe, Olia Lialina a déclaré que l’expérience originelle de l’œuvre avait disparu, parce qu’à l’époque, on attendait vraiment en se demandant ce qui allait se passer. Aujourd’hui, tout va plus vite et apparaît sans cette tension qui était présente pour les premiers utilisateurs. Depuis, elle a restauré l’œuvre, pas uniquement pour la vitesse, mais également à cause d’autres problèmes. Cette étude de cas est disponible sur le site de l’INCCA .

 

Capture d'écran de My boyfriend came back from war, 1996, Olia Lialina.

 

PACKED : Quel types de limitations avez-vous rencontrer avec la virtualisation?

Juergen Enge : Parfois, cela concerne simplement les performances internes de l’ordinateur. On ne peut pas virtualiser une œuvre pour laquelle un super PC avec processeur Quad-core ou Core i7 est nécessaire. C’est le même problème avec les œuvres basées sur des moteurs de jeu très récents – la plupart du temps, il faut une carte graphique très rapide. C’est la raison pour laquelle, jusqu’à présent, ces œuvres sont souvent impossibles à virtualiser.

Tabea Lurk : Il y a des éléments qu’on ne peut pas traiter comme on le voudrait ; en particulier la possibilité de ralentir un système de manière à afficher, avec la bonne vitesse, non seulement les images, mais aussi le son. Le son est difficile à ralentir, parce qu’on y est beaucoup plus sensible. Et si la machine virtuelle tourne à la bonne vitesse, ça donnera un son saccadé : « tac tac tac ».

 

PACKED : Avez-vous rencontré des problèmes liés à la propriété intellectuelle?

Tabea Lurk : C’est un problème auquel nous devons faire face. Selon moi, il faudrait un système semblable à celui des États-Unis, où l’archivage ignore certaines limitations des droits à des fins de préservation , par exemple lorsqu’il s’agit de préserver des jeux ou des CD-ROM protégés par des mots de passe ou la technologie DRM34.

 

PACKED : Y a-t-il également des problèmes de droits lorsque vous travaillez avec l’émulation?

Juergen Enge : Oui. Avec les produits Mac, c’est très compliqué, parce qu’on n'est pas autorisé à copier le BIOS35. Pour Windows, nous avons contacté Microsoft et il n’y a pas de problème. On peut utiliser toutes les anciennes versions de Windows, mais ils ne nous aideront pas s’il y a un pépin. Pour les ordinateurs Apple, la ROM36 constitue le plus grand écueil, parce qu’il est illégal d’y toucher. Je ne sais pas par quelle voie légale on peut régler ce problème.

Tabea Lurk : Les œuvres utilisant des ordinateurs Apple posent de nombreux problèmes, parce que la virtualisation n’est pas prise en charge, et comme l’a dit Juergen, on est dans une zone grise lorsqu'on utilise un émulateur Mac. Techniquement, il est plus facile de trouver un logiciel de virtualisation ou un émulateur pour tous les systèmes Windows et Linux que pour les systèmes Apple. C’est dommage, parce que beaucoup d’œuvres utilisent des machines Mac. Dans le cas des œuvres produites avec Max/MSP sur un ordinateur Apple, il est très difficile de se débarrasser de l’environnement Mac, ou même de parvenir à une encapsulation durable.

Juergen Enge : Il est possible d’émuler les anciens ordinateurs Apple, mais c’est plus difficile pour les systèmes récents. Il existe des moyens pour émuler les versions serveur de Mac OS X, mais celles-ci ne sont pas faites pour fonctionner avec des cartes graphiques puissantes, ce qui est très problématique.

 

PACKED : N’y a-t-il pas d’autre solution que l’émulation pour les œuvres conçues dans Max/MSP?

Tabea Lurk : J’ai encore l’espoir que les œuvres en Max/MSP sur lesquelles nous travaillons finiront par être traduites ou migrer vers Pure Data. Je ne suis pas sûre que ça arrivera. Il existe beaucoup d’œuvres de ce type, pour la simple raison que Max/MSP est un excellent outil, utilisé par un grand nombre d’artistes parce qu’il permet de faire énormément de choses différentes.

 

PACKED : De quel type d’œuvres, aujourd’hui conservées, la préservation pourrait-elle devenir problématique à l’avenir?

Tabea Lurk : Un nouveau genre d’œuvres arrive : celles qui utilisent des appareils mobiles, des smartphones, qu’il est très facile de se procurer, mais qui sont problématiques parce qu’ils risquent de devenir très rapidement obsolètes.

Juergen Enge : Les premiers logiciels d’émulation pour smartphones commencent déjà à apparaître. Ils utilisent différents environnements logiciels pour les applications d'entreprises et celles dédiées à une utilisation personnelle ou privée. L’émulation des smartphones ne posera pas de problèmes, mais on n’aura plus la même interface. On aura l’émulation d’un smartphone sur un PC. Il est très difficile de trouver des solutions pour ces œuvres basées sur du hardware spécifique. Prenez une œuvre basée sur un sous-système audio Fireface, un appareil qui comporte quarante canaux audio : je ne saurais pas quoi faire si le hardware n’était plus disponible.

 

PACKED : L’obsolescence du matériel continuera donc à poser des problèmes à l’avenir?

Tabea Lurk : L’obsolescence restera un problème pour les œuvres qui utilisent des smartphones.
Pour vous donner un exemple historique, Lynn Hershman utilisait le système LaserDisc dans son œuvre Lorna. L’utilisateur navigue à travers l’œuvre grâce à une télécommande, et cette navigation – y compris l’image de la télécommande – est visible. Le matériel est donc extrêmement important, ainsi que le mappage entre les chiffres sur la télécommande et ceux sur l’image, etc.

 

Vue de l'installation de Lorna (1983-1984) de Lynn Hershman Leeson. © Lynn Hershman Leeson.

 

Capture vidéo de Lorna (1983-1984) de Lynn Hershman Leeson. © Lynn Hershman Leeson.

 

PACKED : Pourriez-vous nous décrire votre méthode de documentation ? Cela implique-t-il des routines spéciales?

Tabea Lurk : Notre travail de documentation s’organise en fonction des recommandations de la science de la conservation : documenter l’état actuel de l’œuvre, la manière dont on l’examine, y compris l'agenda des traitements ; ensuite, documenter le traitement. On identifie d’abord les composants matériels et on détermine s’ils sont essentiels à l’œuvre, ce qui signifie qu’on ne reprend pas nécessairement dans la documentation tout ce qui appartient au système, les bibliothèques logicielles, etc., mais que tous les composants sont structurés hiérarchiquement selon leur importance, en indiquant clairement leur fonction. Cette structure claire est appliquée à tous les niveaux, jusqu’à celui des fichiers.

Il faut examiner rapidement le fichier et déterminer quelle partie du code fait appel à telle bibliothèque logicielle ou, encore mieux, à un fichier précis de la bibliothèque en question pour exécuter certaines fonctions. Par exemple, ImageMagick37 est souvent utilisé, et non seulement la documentation indique de quelle version il s’agit, mais elle mentionne aussi le type de fonctions sollicitées pour générer les images.

 

PACKED : La documentation reprend-elle aussi vos propres modifications?

Tabea Lurk : Tout à fait. Prenons l’exemple d’une fresque avec des taches ou des couleurs pâlies : souvent, elle sera restaurée de telle manière qu’on puisse distinguer les matériaux originaux de ce qui a été reconstitué. Pour l'art numérique, et en particulier avec les œuvres basées sur des programmes, pour préserver l’ancienne apparence de l’œuvre, pour que celle-ci soit visible, on peut compléter les parties manquantes, en laissant des traces de ce processus. Dans notre pratique, la documentation du « traitement » est faite de manière similaire, mais au niveau du code.

 

PACKED : Ce travail de documentation autour du code est-il toujours effectué de la même manière?

Juergen Enge : Cela dépend fortement du langage de programmation. Les langages C38 et C++39 , par exemple, disposent de pré-compilateurs. Les anciens langages de programmation comportaient la possibilité d’insérer des commentaires. Les commentaires doivent être clairement identifiés, pour ne pas les confondre avec ceux de l’artiste. Si cela s’avère nécessaire, il faut mettre en place une procédure automatique permettant d’annuler tous les changements et de revenir au code original. Cela n’est possible que si les commentaires sont réalisés correctement – ce qu’on peut faire avec tous les langages de programmation.

Tabea Lurk : Concernant la structure de la documentation, on peut commencer par le fichier cœur de l’œuvre et remonter aux autres éléments, afin que la structure et la manière dont les fichiers sont commentés et présentés dans la documentation, représentent la structure hiérarchique de l’œuvre au niveau du code.
Il faut clarifier la fonction et les interrelations de tous les fichiers ou parties du script. Il peut s’agir d’interrelations au niveau le plus petit comme au plus élevé – par rapport à l’environnement système. Les différents types de séquences ou de procédures doivent être clairement structurés et détaillés.

La documentation ne doit pas forcément constituer un dossier qui commence à la page 1 et se termine à la page 12. Des éléments peuvent être ajoutés plus tard – quand des informations supplémentaires entrent en jeu. La documentation, une fois terminée, donne à la prochaine personne qui travaillera sur l’œuvre une idée précise de l’œuvre et de son parcours.
Notre documentation contient souvent des instantanés du code afin de s’assurer que les éléments que nous avons ajoutés, pour stabiliser ou préserver une version de l’œuvre, sont distincts du code original. Les commentaires autres que ceux de l’artiste doivent être clairement différenciés dans la nouvelle version.

Juergen Enge : Après avoir lu la documentation de l’œuvre, on doit pouvoir évaluer si lla préservation est correcte ou non.

 

PACKED : La phase de documentation prend-elle beaucoup de temps?

Tabea Lurk : Cela dépend de l’œuvre, mais en temps normal nous combinons le travail de documentation à celui de préservation. Dans le cas de la migration d’une pièce vers une machine virtuelle, il est intéressant de documenter l’œuvre en parallèle, comme le prescrivent les directives éthiques, afin de voir si tout fonctionne et si on a tous les éléments nécessaires à l’œuvre. Ensuite, on revérifie tout.

Juergen Enge : Le temps consacré à la documentation dépend aussi du niveau de connaissance que l’on a des langages de programmation utilisés dans l’œuvre.

Tabea Lurk : Une autre question, c’est jusqu’où on va dans la documentation, et s’il faut commenter tous les fichiers. J’ai réalisé la documentation complète d’une œuvre de Marc Lee, Breaking the news, qui a recours à quatorze services web. J’ai ouvert et commenté chaque script pour voir où ils menaient, vers quelles bibliothèques, etc. La documentation aurait pu être réalisée plus rapidement, j’imagine qu’un jour, quelqu’un créera une interface web permettant de cliquer et d’accéder au fichier comme si c’était un lien vers un site web.

 

PACKED : Quels outils utilisez-vous?

Juergen Enge : En interne, nous utilisons MediaWiki pour la documentation, parce qu’on peut facilement lier les éléments entre eux. Quand le même problème apparaît dans plusieurs œuvres, on peut les relier. MediaWiki compte également de nombreux plug-ins, pour afficher un code avec une mise en forme « embelli », par exemple. Un autre élément intéressant, c’est le fait que toutes les versions précédentes sont archivées, donc si quelqu’un a modifié quelque chose, on peut revenir à une version antérieure et voir ce qui a changé. D’après notre expérience, les wikis, et en particulier MediaWiki, sont d’excellents outils pour réaliser ce type de documentation.

 

Vue d'installation de Breaking The News. Avec la permission de Marc Lee.

 

PACKED : Comment pensez-vous que les musées parviendront à gérer toutes ces œuvres basées sur l’informatique dans les années à venir?

Tabea Lurk : Je suis généralement très optimiste, parce que les nouvelles solutions technologiques ne font pas que poser des problèmes : elles fournissent aussi de nouvelles idées, et selon moi, la science informatique doit pouvoir nous aider. J’ai l’impression qu’on pourrait en apprendre beaucoup plus dans ce domaine, on pourrait résoudre des problèmes grâce aux solutions développées pour le domaine de l'informatique. Il s’agit simplement de transférer et d’appliquer des connaissances, j’aimerais beaucoup qu’on dépasse nos habitudes à cet égard. En Allemagne en particulier, les directives dont nous disposons aujourd’hui sont principalement issues de l’archivage à long terme ou de processus d’auto-apprentissage, sans qu’on ait réellement étudié l’informatique et les mathématiques. Je sais que nous travaillons dans un domaine très dynamique, mais en ce moment nous ne sommes pas entièrement libres de développer nos idées comme nous le voudrions.

 

PACKED : Êtes-vous aussi optimiste concernant les œuvres qui utilisent des ressources telles que YouTube, des flux RSS, etc. ou même des ressources situées dans des univers virtuels comme Second Life?

Tabea Lurk : D’après moi, il existe déjà des stratégies pour archiver les communautés du Web 2.0. Il sera intéressant de voir leur fonctionnement, et comment les archives des institutions culturelles pourront construire des passerelles à l’avenir.
Certaines informations seront oubliées, évidemment, et beaucoup de contenus seront perdus ou seulement documentées, mais ce sera une sorte d’ensemble diversifié. Il est difficile de dire vers quoi on va se diriger : ce type d’œuvres possède sa propre vie et son propre développement cybernétiques. J’espère que plus tard, la société et de nouvelles générations de travailleurs culturels seront plus ouvertes à ce type d’évolutions technologiques.

Du point de vue technologique, j’ai l’impression qu’à un moment ça pourrait devenir plus facile. Nous avons parlé des smartphones, pour lesquels il faudra se poser encore une fois la question de l’obsolescence du hardware, mais en même temps, on se dirige vers le cloud et le cloud computing40, donc on dépend de moins en moins du matériel physique. Si le HTML 541 devient le standard, les données seront beaucoup plus faciles à préserver, parce que le HTML 5 est très clairement structuré et permet même d’afficher des vecteurs graphiques ou des images TIFF, qui ne pourraient pas l’être avec d’anciens navigateurs. La vidéo est aussi intégrée et affichée directement, etc.

 

PACKED : Une attention constante aux nouvelles technologies est donc nécessaire ? Est-ce là quelque chose que vous faîtes?

Juergen Enge : Dans le domaine de la préservation des œuvres basées sur l’informatique, on travaille énormément pour préserver de vieux objets et œuvres d’art. Nous rencontrons de nombreux problèmes issus du fait qu’il faut comprendre les anciens logiciels, les anciennes machines, etc. Si on examine cela d’un point de vue technique, je n’ai plus envie d’être en retard. Ma stratégie serait donc d’analyser comment il faudra préserver les œuvres futures. C’est la raison pour laquelle nous faisons des recherches sur l’IPv6, par exemple, et que nous construisons des applications basées sur des navigateurs qui apparaîtront dans les prochaines années.

Je veux savoir comment gérer ce type de technologies avant qu’elles n’apparaissent pour de bon. Je veux anticiper les problèmes futurs et élaborer des solutions. Je ne veux pas me retrouver face à une montagne de problèmes qu’on ne pourra plus résoudre, et qui deviendront de plus en plus problématiques parce que la technologie n’est plus compatible ou parce qu’il faudrait pour cela stocker d’anciens équipements. La qualité ne s’améliore pas, parce que je ne travaille qu’avec des machines anciennes. J’aimerais vraiment étudier les problèmes futurs et m’assurer qu’on aura une chance de les résoudre.

Tabea Lurk : Nous avons accompli un certain nombre d'étapes, mais il serait faux d’affirmer que nous avons trouvé une approche systématique pour tous les problèmes et une stratégie permettant de satisfaire à toutes les exigences possibles d’une œuvre. Il reste encore de nombreux trous à combler.

 

 

Notes:

 

  • 1. Le projet de recherche AktiveArchive est une initiative de l’Université des arts de Berne (BUA) en collaboration avec l’Institut suisse pour l’étude de l’art, situé à Zurich. Voir : http://www.hkb.bfh.ch/de/forschung/forschungsschwerpunkte/fspmaterialitaet/aktivearchive1/.
  • 2. Le ZKM tient un rôle unique dans le monde de l’art ; il s’agit d’une institution interdisciplinaire consacrée à la recherche, en particulier dans le domaine des nouveaux médias. Depuis sa création en 1997, le ZKM est devenu une plateforme importante pour la production et l’exposition de l’art contemporain et des technologies médiatiques émergentes. Depuis 1999, l’institution est dirigée par l’artiste, commissaire d’exposition et théoricien Peter Weibel. Voir l’entretien avec Christoph Blase, qui est responsable du Laboratory for Antique Video Systems au ZKM : https://www.scart.be/?q=fr/content/entretien-avec-christoph-blase-zkm.
  • 3. Musée des médias. Voir : http://on1.zkm.de/zkm/e/institute/medienmuseum
  • 4. Institut pour le développement web. Voir : http://on1.zkm.de/zkm/e/institute/Netzentwicklung/
  • 5. Le projet interdisciplinaire GAMA – Gateway to Archives of Media Art a été lancé le 1er novembre 2007 par dix-neuf organismes européens dans les secteurs de la culture, des arts et de la technologie, avec pour objectif de créer un portail web central pour différentes collections européennes d’arts médiatiques à destination du public intéressé, des commissaires d’exposition, des artistes, des universitaires, des chercheurs, des médiateurs – une initiative qui a reçu le soutien de la Commission européenne dans le cadre du programme eContentplus.
  • 6. Voir http://performative-science.de/liquidperceptron2d.html
  • 7. Voir http://www.v78.org/.
  • 8. Voir : State of the Art and Practice in Digital Preservation ; http://web.archive.org/web/20100527173801/http://nvl.nist.gov/pub/nistpubs/jres/107/1/j71lee.pdf
  • 9. L’environnement d’exécution est un composant d’un logiciel destiné à accompagner l’exécution de programmes écrits dans un langage informatique. Source : Wikipédia. 
  • 10. En informatique, un patron de conception est une solution générale applicable à un problème de conception récurrent d’un logiciel dans un contexte donné. Un patron de conception n’est pas une solution aboutie pouvant être transformée en code directement. C’est une description ou un modèle de résolution d’un problème applicable à de nombreuses situations différentes. Source : Wikipédia.
  • 11. Dans le domaine des réseaux informatiques, un serveur proxy est un serveur (un ordinateur ou une application) qui sert d’intermédiaire pour les requêtes provenant de clients qui sollicitent des ressources d’autres serveurs. Un client se connecte au serveur proxy, sollicitant un service tel qu’un fichier, une connexion, une page web ou autre ressource disponible via un autre serveur. Le serveur proxy évalue cette requête en fonction de ses règles de filtrage. Source : Wikipédia.
  • 12. En informatique, un pont est un patron de conception destiné à « découpler une abstraction de son implémentation de sorte que les deux puissent varier de manière indépendante ». Source : Wikipédia.
  • 13. Le modèle TCP/IP désigne une série de directives en matière de conception d’implémentation, appliquées dans les protocoles de gestion de réseau, pour permettre aux ordinateurs de communiquer par l’intermédiaire d’un réseau. Le modèle TCP/IP permet une connectivité « de bout-à-bout », spécifiant comment les données doivent être formatées, adressées, transmises, acheminées et reçues. Des protocoles existent pour de nombreux types de communications différents entre des ordinateurs. Source : Wikipédia.
  • 14. Le format SIARD (Software Independent Archiving of Relational Databases) a été développé par les Archives fédérales suisses. Il fait maintenant partie intégrante de la plateforme archivistique numérique du projet européen de recherche Planets. Les spécifications du format sont libres et accessibles sur le Web. Source : https://www.bar.admin.ch/bar/fr/home/archivage/outils-et-instruments/siard-suite.html
  • 15. Voir l’entretien avec Johannes Gfeller.
  • 16. Voir : http://cool.conservation-us.org/waac/wn/wn21/wn21-2/wn21-208.html.
  • 17. Voir : http://www.dca-project.eu.
  • 18. Voir : http://www.medienkunstnetz.de/works/raw-material/.
  • 19. Voir: http://mattersinmediaart.org/.
  • 20. XcultVoir : http://www.xcult.org/.
  • 21. Voir : http://www.hub3.org/forsch1/forsch/shrink_list.html.
  • 22. Une image disque est un fichier ou une unité de stockage qui renferme l’ensemble du contenu et de la structure d’un médium ou d’un appareil destiné au stockage de données, tel qu’un disque dur, une bande magnétique, une disquette, un disque optique ou une clé USB. En général, on crée une image disque en copiant l’intégralité du médium source secteur par secteur, ce qui permet de reproduire parfaitement la structure et le contenu de l’unité de stockage. Source : Wikipédia.
  • 23. En informatique, un instantané est l’état d'un système à un instant donné. Le terme a été inventé par analogie avec le procédé photographique du même nom. L’instantané peut désigner une copie réelle de l’état du système ou la simple capacité de le faire de certains systèmes. Source : Wikipédia.
  • 24. L’AGP (Accelerated Graphics Port) est un port interne à haut débit destiné à connecter la carte mère d’un ordinateur à une carte graphique, qui permet principalement d’accélérer le traitement de la 3D. Source : Wikipédia.
  • 25. La « Demoscene » est une sous-culture informatique ayant pour but de créer des « démos », des productions audiovisuelles non interactives qui tournent en temps réel sur un ordinateur. L’objectif principal de la création de « démos » est d’afficher ses compétences de programmeur en même temps que ses talents artistiques et musicaux.
  • 26. DOSBox est un logiciel d’émulation qui simule un environnement MS-DOS compatible IBM PC. Logiciel gratuit, DOSBox est surtout utilisé pour faire tourner des anciens jeux PC. Source : Wikipédia.
  • 27. QEMU est un émulateur de système qui se base sur une translation de code dynamique pour garantir une vitesse raisonnable, tout en prenant facilement en charge de nouveaux processeurs hôtes. Outre l’émulation, QEMU fournit de nombreux modèles de machines qui permettent d’exécuter divers systèmes d’exploitation « invités » sans devoir les modifier ; il peut être considéré comme le moniteur d’une machine virtuelle hôte. QEMU compte également un mode accéléré, destiné à héberger un mélange de translation de code (pour le noyau du système) et d’exécution native (pour le code utilisateur), à la manière de VMware Workstation et VirtualBox. QEMU peut aussi être utilisé à des seules fins d’émulation de systèmes, pour des processus utilisateurs, en faisant tourner sur un système des applications conçues pour un autre. Source : Wikipédia.
  • 28. VHDL (VHSIC Hardware Description Language) est un langage de description de matériel utilisé en automatisation électronique pour représenter les systèmes numériques et mixtes tels que les FPGA (field programmable gate arrays, circuits programmables) et les circuits intégrés. Source : Wikipédia.
  • 29. Netart Routeur est un outil de préservation pour l’analyse, la documentation, l’archivage et la monstration d’œuvres basées sur Internet et de contenus web dynamiques. Voir http://www.hkb.bfh.ch/de/forschung/forschungsschwerpunkte/fspmaterialitaet/aktivearchive1/.
  • 30. Le DPI (Deep Packet Inspection, inspection des paquets en profondeur) est une forme de filtrage informatique des paquets qui examine les données (et potentiellement l’en-tête) d’un paquet quand il passe par un point d’inspection, à la recherche d’éléments non conformes au protocole, de virus, de SPAM, d’intrusions ou autres critères prédéfinis, afin de déterminer si le paquet peut passer ou s’il doit être redirigé vers une autre destination, ou encore à des fins statistiques. Source : Wikipédia.
  • 31. Une interface de programmation (Application programming interface, API) est une spécification basée sur un code source, qui sert d’interface permettant l’interaction entre différents composants logiciels. Une API peut inclure des spécifications pour des routines, des structures de données, des classes d’objets et des variables. Source : Wikipédia.
  • 32. L’IPv6 (Internet Protocol version 6) est une version de l’Internet Protocol (IP) censée succéder à l’IPv4, le protocole actuellement utilisé pour orienter la quasi-entièreté du trafic Internet. Source : Wikipédia.
  • 33. L’IPv4 (Internet Protocol version 4) est la quatrième version de l’Internet Protocol (IP) et la première à être largement déployée. Avec l’IPv6, il constitue le noyau des méthodes d’« internetworking » basées sur des standards. L’IPv4 reste le protocole Internet Layer le plus répandu (en 2011, l’IPv6 commençait seulement à être diffusé). Source : Wikipédia.
  • 34. Le terme de DRM (pour Digital rights management, gestion des droits numériques) renvoie à un ensemble de technologies limitant l’accès à des fichiers, utilisés par des industriels, des éditeurs, des ayants-droit et des particuliers pour restreindre l’utilisation des contenus et appareils numériques après la vente. Les DRM désignent toute technologie empêchant une utilisation d’un contenu numérique non désirée par son fournisseur. Les protections contre la copie, qui peuvent être contournées en modifiant le fichier ou l’appareil, telles que les numéros de série ou les clés numériques, ne sont généralement pas considérées comme des DRM. Ces derniers incluent également des œuvres ou des appareils numériques précis. Des entreprises comme Amazon, AOL, Apple Inc., la BBC, Microsoft et Sony utilisent les DRM. En 1998, le Digital Millenium Copyright Act (DMCA) a été voté aux États-Unis afin d’infliger des sanctions à qui crée des dispositifs dont le but et la fonction principaux sont de détourner les technologies de protection des contenus. Source : Wikipédia.
  • 35. Dans les ordinateurs compatibles PC IBM, le BIOS (basic input/output system), intégré à la carte mère, est le premier code exécuté par le système dès l’allumage (ce qu’on appelle boot firmware). Au démarrage, le BIOS procède d’abord à un auto-test (power-on self-test), qui initialise et identifie les appareils système tels que la carte vidéo, le clavier et la souris, le disque dur, le lecteur optique, etc. Source : Wikipédia.
  • 36. La mémoire morte ou ROM (read-only memory) est un type de médium de stockage utilisé dans les ordinateurs et d’autres appareils électroniques. Les données stockées dans la ROM ne peuvent être modifiées, ou seulement après un processus lent et difficile, de sorte qu’elle est principalement utilisée pour la distribution de firmwares (logiciels étroitement liés à un matériel précis, nécessitant peu de mises à jour). Source : Wikipédia.
  • 37. ImageMagick est un logiciel open source permettant de créer, de convertir, de modifier et d’afficher des fichiers d’images matricielles. Il permet de traiter plus de cent formats d’images. ImageMagick est enregistré sous la licence Apache 2.0. Source : Wikipédia.
  • 38. C est l’un des langages de programmation les plus répandus. Des compilateurs C existent pour la plupart des architectures informatiques. C a influencé de nombreux autres langages de programmation, dont le plus célèbre est C++, qui était au départ une extension de C. Source : Wikipédia.
  • 39. C++ est l’un des langages de programmation les plus populaires dans de nombreuses applications, comme les logiciels système, les programmes informatiques, les pilotes, les logiciels intégrés, les serveurs haute performance et les applications clientes, ainsi que les jeux vidéo. Source : Wikipédia.
  • 40. Le cloud computing est un procédé consistant à traiter l’informatique comme un service plutôt que comme un produit, grâce auquel les ressources, les logiciels et les informations parviennent aux ordinateurs ou à d’autres appareils par un service passant par un réseau (Internet, le plus souvent). Le cloud computing donne aux utilisateurs du cloud un accès à des données, à des logiciels, à des structures de stockage ou à des opérations informatiques sans qu’ils doivent connaître l’endroit où se trouvent ces services ni les détails de l’infrastructure informatique qui les héberge. Source : Wikipédia.
  • 41. Le HTML 5 est un langage permettant de structurer et de présenter des contenus pour le Word Wide Web. C’est une technologie centrale d’Internet, proposée à l’origine par le logiciel Opera. Il s’agit de la cinquième révision du standard HTML (créé en 1990 et devenu le standard HTML 4 en 1997), qui, au mois de février 2012, était toujours en cours de développement. Ses objectifs principaux sont l’amélioration du langage HTML, avec intégration des derniers multimédias, tout en restant lisible par les humains et compris par les ordinateurs et autres appareils (navigateurs web, analyseurs syntaxiques, etc.). Le HTML 5 est censé intégrer le HTML 4, mais également le XHTML 1 et le DOM Level 2 HTML. Source : Wikipédia. 
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